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Les différents types de conversations

Auteur : Paul Ouellet, Mentor en économie sociale et responsable du développement du mentorat en économie sociale au Québec.

Pour devenir un mentor de qualité, il ne suffit pas d’être un monsieur ou une madame Sait Tout. Au contraire, les Joe Connaissant et les madame-sait-tout risquent de voir leurs dyades ne pas durer très longtemps. Il est donc essentiel de savoir faire la conversation avec son mentoré. Facile à dire, mais quelle est la meilleure façon de converser avec un ou une mentorée?

 

1- Conversation directive

La « conversation directive « est celle où l’une des personnes impose son pouvoir. En mentorat, ce serait celle où un mentor se place en position de prendre le contrôle des échanges et des discussions. Habituellement, un tel mentor s’intéresse avant tout à l’entreprise plutôt qu’à l’entrepreneur. Il cherche des résultats concrets qui vont le satisfaire. Il prend le contrôle de la démarche et se montre insatisfait du mentoré si celui-ci n’évolue pas dans la direction attendue. C’est la conversation d’un boss envers un employé ou d’un expert envers des subalternes moins compétents. Dans une « conversation directive « , c’est le mentor qui devient l’acteur principal au détriment du mentoré.

2- Conversation collaborative

Cette expression de « conversation collaborative « m’a été fournie par un mentor lors d’une formation. J’ai compris que dans ce type de conversation, le mentor se met sur un pied d’égalité avec son mentoré. Il s’agit d’une conversation ouverte et accueillante qui se rapproche d’un dialogue entre amis. Le mentor n’impose pas d’autorité son idée. Il écoute l’avis ou le commentaire de son mentoré et lui répond par son propre avis ou sa propre opinion. Il peut exprimer des doutes sur ce que son mentoré présente ou explique. Dans le courant de la conversation, il donne un conseil ou l’autre en s’appuyant sur son expérience. Il affirme plus qu’il ne questionne. Les expressions : tu pourrais ou tu devrais peut-être arrivent facilement dans la bouche du mentor qui ne souhaite que le meilleur pour son mentoré. C’est la conversation de collègues de travail qui se respectent.

3- Conversation exploratoire

Cette dernière expression, je viens de l’inventer afin de présenter une autre forme de conversation. Cette conversation se veut non directive et tout orientée sur la découverte et la prise de conscience. C’est celle mise de l’avant lorsque l’on souhaite que le mentoré s’exprime 70% du temps lors d’une rencontre. Pour relever ce défi de la libre expression, le mentor doit être très à l’écoute, ne rien perdre de ce que le mentoré dit et poser de multiples questions. La cible principale est de permettre au mentoré de s’exprimer comme personne et comme entrepreneur, de découvrir autant qui il est que ce qu’il veut réaliser. Le mentor demeure constamment à l’affût des angles morts que le mentoré ne voit pas et des zones d’ombre à mettre en lumière. Bref, le mentor questionne beaucoup plus qu’il n’affirme. Il favorise l’exploration comme un bon intervieweur T V ou radio qui met en valeur son invité. Le mentoré devient le centre de toute l’attention, c’est l’acteur principal.

Conclusion

Il va sans dire que la « conversation directive « n’a pas sa place dans le développement d’une relation mentorale. Les entrepreneurs disent souvent qu’ils veulent être leur propre patron. Le mentorat de boss à employé n’a assurément pas de grandes chances de réussite auprès des entrepreneurs mentorés. La « conversation collaborative « ne conduit pas nécessairement à l’échec. Elle offre des qualités certaines : ouverture, accueil, réciprocité, respect. Ses chances de succès sont meilleures lorsque le mentor et le mentoré se retrouvent sur des terrains communs comme une expertise partagée, des expériences communes ou des centres d’intérêt similaires. Basée sur un dialogue amical, cette « conversation collaborative « comporte tout de même d’importants pièges. Le mentor s’implique dans le jeu de la conversation et peut facilement se faire prendre au jeu devenant ainsi beaucoup moins à l’écoute du mentoré. Son esprit cherche toujours à ajouter des éléments pertinents pour enrichir la conversation. Il est dans l’action et risque d’avoir le nez dans la vitrine ou dit autrement le cerveau accaparé par la volonté de contribuer aux solutions en construction. Le mentor qui utilise ce type de conversation risque de manquer de distance et de recul pour débusquer les angles morts et les zones d’ombre. Il risque même de parler plus longtemps que son mentoré.

Pour améliorer sa posture mentorale et donner plus d’espace de réflexion et de prise de conscience au mentoré, le mentor a avantage à se familiariser avec le dernier type de conversation: la « conversation interrogative «. Elle consiste essentiellement à faire parler le plus possible le mentoré. Familiarisé avec plusieurs types de questions, le mentor interroge le mentoré par des questions ouvertes qui permettent au mentoré d’explorer des territoires inconnus de son entreprise et surtout de lui-même. Un proverbe dit que le plus important n’est pas de donner un poisson à celui qui a faim, mais de lui apprendre à pêcher. En entrepreneuriat, nous pourrions dire que le plus important n’est pas de donner une solution, mais d’apprendre à en trouver une. Plus le mentor s’astreint à questionner son mentoré, plus il favorise des découvertes personnelles et des prises de conscience. Comme il n’y a pas d’âge pour apprendre, nous avons tous et toutes comme mentors la possibilité de nous mettre à l’apprentissage de la conversation interrogative celle qui favorise la réflexion, la curiosité et la découverte.